7 novembre

La journée commence sous la pluie fine, qui devient de plus en plus présente au fur et à mesure que nous avançons. En fin de matinée, nous atteignons Moissac, où nous aimerions faire quelques courses et une lessive. Alors que nous nous arrêtons sous un abri-bus pour faire quelques recherches et savoir où trouver une laverie, la pluie redouble d'intensité. Nous sommes sur le point de repartir lorsqu'une camionette d'artisan s'arrête à notre hauteur ; son conducteur nous indique le GR65. Nous lui expliquons que nous cherchons une laverie et de quoi faire des courses et il nous propose de nous y conduire. Au vu de la pluie battante sous laquelle nous nous trouvons, nous acceptons. Paul, notre conducteur, nous dit que nous pouvons aussi faire la lessive chez lui et aller dans un magasin de quartier pour les courses. Pourquoi pas... Alors que nous faisons route, Paul nous fait une sacrée frayeur en grillant un feu rouge ! Il s'excuse, expliquant que le fait de nous parler l'a distrait de la conduite. Peu avant que nous arrivions chez lui pour poser nos sacs, il nous propose de passer la nuit dans sa maison en donativo, si nous le souhaitons. La météo rend la proposition séduisante... jusqu'à ce que nous rentrions dans ladite maison. Paul nous explique qu'il a emménagé il y a un an, et qu'il n'a pas encore vraiment ouvert ses cartons. Et en effet, le logement est envahi par un capharnaum indescriptible, sur lequel règne une très forte odeur de renfermé. Nous nous frayons un chemin jusqu'à la chambre, identique au reste de la maison : nous échangeons un regard... la situation commence sérieusement à nous faire penser à notre expérience malheureuse chez Francine une semaine plus tôt, et nous cherchons tous les deux comment faire pour ne pas nous retrouver dans une situation délicate. Nous annonçons qu'avant de prendre une décision nous allons faire les courses, ce qui nous permettra de réfléchir. Paul a aussi quelques courses à faire et nous nous rendons au magasin ensemble. Mais lorsqu'il passe en caisse, sa carte est refusée. Pendant qu'il se rend jusqu'à son agence bancaire pour comprendre ce qu'il se passe, nous décidons d'invoquer une petite éclaircie bienvenue, pour reprendre le chemin. Paul revient dépité, n'ayant pas réussi à débloquer sa carte : nous comprenons qu'après toute l'aide que nous avons reçue sur le chemin, c'est cette fois à notre tour de donner un coup de main, et nous réglons ses courses, avant d'annoncer que nous allons finalement reprendre la route. Déçu, Paul nous accompagne pour nous remettre sur le bon chemin : il en profite pour nous expliquer sa détresse à la suite de son divorce, et les ennuis financiers qui ont suivi. Nous sommes sincèrement peinés de la situation très délicate dans laquelle il se trouve, et lui faisons promettre d'aller voir une assistante sociale pour l'aider à s'en sortir.

Nous voici maintenant sur les berges d'un canal parallèle au Tarn, un peu remués par notre rencontre, mais heureux d'avoir su ne pas reproduire l'erreur de la semaine précédente. Nous longeons le canal tout l'après-midi jusqu'à Malause. Les prévisions météorologiques annoncent beaucoup de pluie dans la nuit, et nous aimerions dormir en gîte. Nous contactons un premier gîte, ouvert toute l'année, qui ne peut pas nous recevoir ce soir, puis un deuxième gîte, ouvert toute l'année dont la propriétaire est en cure, et enfin un établissement qui accepte les chiens sur le guide, mais ne les accepte pas lorsque nous le contactons. Déçus de ces réponses et des informations erronées qui nous ont induits en erreur, nous décidons de demander aux commerçants s'ils connaîtraient un lieu abrité pour y dormir. Les réponses vont du "Non, désolé" à la recommandation d'un gîte 4 km plus loin, sans assurance aucune de pouvoir être reçus, alors qu'il fait déjà nuit, froid, et que nous avons marché 20 bons km. Finalement quelqu'un nous recommande l'avancée de la salle des fêtes, qui se révèle se trouver 2 kilomètres plus loin. Lorsque nous l'atteignons enfin, nous apprenons qu'il s'y déroule des activités jusqu'à 23 h. On nous permet de rentrer pour prendre de l'eau mais on nous explique clairement que ce ne sera pas possible de nous laisser dormir à l'intérieur.

Toujours en recherche d'un lieu abrité, nous finissons par trouver un accès aux tribunes du stade, pourvues d'un toit et de 2 côtés en plexiglas. Nous sommes protégés d'une certaine manière, mais nous sommes aussi très exposés : toute la partie avant, très haute, est évidemment grande ouverte, et laisse rentrer l'air, très froid. Après avoir rapidement préparé un repas chaud, nous nous endormons en repensant aux réactions des hébergeurs et des habitants de Malause, et en nous demandant si c'est de l'indifférence pure, de l'inconscience ou de l'égoïsme qui permet de laisser deux pèlerins dormir dehors par des températures si froides et des nuits si pluvieuses, sans se poser plus de questions.